Clinique du dos

Le spondylolisthésis dégénératif lombaire

Auteur : Jacques LLOPIS

Le spondylolisthésis dégénératif est le glissement (" olisthésis ") antérieur, de la 4ème lombaire le plus souvent, par faillite des éléments de stabilisation du rachis. Son origine est pluri-factorielle et l'évaluation par l'imagerie, l'électro-physiologie et les scores cliniques de tolérance fonctionnelle est essentielle pour une pathologie, dont le traitement reste malgré tout médical, conservateur dans 80% des cas.

Définition

Dans ce cadre nosologique :
- l'arc postérieur est intègre : il n'y a pas de lyse isthmique,
- il existe une nette prédominance féminine, sex-ratio 4/1,
- l'occurence est rare avant 50 ans,
- l'olisthésis antérieur ne dépasse jamais le 1/3 de la dimension antéro-postérieure du corps vertébral.

C'est la pathologie dégénérative du segment vertébral qui est à l'origine de cette déstabilisation antérieure dans le plan sagittal du rachis lombaire. La vertèbre L4 étant la vertèbre où se situe le maximum de contrainte (segment lombaire le plus mobile), elle va être la plus fréquemment intéressée par ce processus de glissement.

Physiopathologie-facteurs favorisants

L'origine est multi-factorielle. Deux points essentiels sont à retenir :
- la sagittalisation des facettes qui amène à définir un angle transverse facettaire,
- l'anomalie transitionnelle de la charnière lombo-sacrée de type sacralisation de L5 (4 fois plus fréquente dans les spondylolisthésis lombaires dégénératifs (SLD).
Sur ces deux anomalies, vont intervenir : la discopathie, la laxité ligamentaire (retrouvée chez 65 % des patients) et l'atteinte des haubans musculaires dans le cadre du syndrome trophostatique post-ménopausique pour aboutir au SLD.

Clinique

Les tableaux cliniques réalisés sont essentiellement de type : lombalgie isolée, lombo-radiculalgie ou le plus souvent poly-radiculalgie de type canal lombaire étroit, apparaissant à l'effort (classique claudication intermittente neurologique) et enfin le stade de radiculalgie installée chronique. Il existe parfois des complications à type de syndrome de la "queue de cheval" et troubles vésico-sphinctériens lorsque la déstabilisation s'accentue de façon brutale (facteur traumatique de type chute sur le dos ou le fondement, intervention sur la paroi abdominale antérieure) ou insidieuse, par manque de surveillance clinique.
A l'examen, les signes physiques à rechercher sont :
- la dépression de l'apophyse épineuse de L4 et saillie de l'apophyse épineuse sus-jacente,
- la douleur, qui peut être provoquée à la pression appuyée de cette épineuse, également retrouvée lors de la mise en hyper extension.
L'évaluation précise, clinique, du retentissement fonctionnel est un point-clé puisque c'est à partir de ce bilan initial que la surveillance clinique neurologique pourra s'effectuer, pouvant parfois conduire, avec les examens para-cliniques complémentaires, à une décision chirurgicale. Mais on peut aussi, assister à une stabilisation naturelle par une majoration des phénomènes lombo-discarthrosiques et en particulier, des hypertrophies des massifs articulaires postérieurs, freinant le glissement.
Cette évaluation clinique "mesure" le fameux périmètre de marche, inférieur à 100 mètres, entre 100 et 500 mètres et supérieur à 500 mètres, apprécie le caractère mono ou poly-radiculaire. Elle précise la part des lombalgies, essaye de détecter au plus tôt les déficits neurologiques sensitivo-moteurs des membres inférieurs voire sphinctériens.
Enfin, l'évaluation apprécie la réponse thérapeutique. Des scores sont établis, qui permettront, lorsqu'ils seront mesurés, en post-opératoire, d'évaluer le bénéfice obtenu par l'acte chirurgical et dans les études, par ailleurs, de comparer les différentes techniques opératoires.

Les examens complémentaires

Les radiographies standards, debout, de face et surtout de profil, qui objectivent l'olisthésis antérieur, qui peuvent être sensibilisées par des manoeuvres d'hyper-extension testant ainsi la stabilité dynamique. Une classification radiologique permet de classer les SLD en trois catégories en fonction du rapport distance inter-facettaire et distance inter-pédiculaire (classification de SATO). Une distance facettaire faible étant retrouvée chez 50% des sujets olisthésiques contre 3,5% dans une population témoin. Des clichés complémentaires (ex : grand cliché de DE SEZE) permettent d'éliminer une coxopathie intriquée, de diagnostic important puisque la douleur radiculaire est souvent de territoire L4 se superposant à celui de la douleur d'origine coxo-fémorale.

Le scanner permettra :
- de mesurer l'angle transverse facettaire qui, lorsqu'il est inférieur à 40° est un facteur important de déstabilisation,
- d'apprécier la qualité de l'espace inter-somatique : le disque pouvant présenter, soit une hauteur normale, soit une déshydratation avancée,
- de mesurer les diamètres antéro-postérieurs et transversaux (diamètre "utile" intra-rachidien),
- de préciser l'existence de kystes articulaires postérieurs très fréquents dans cette pathologie,
- d'objectiver une éventuelle hypertrophie des ligaments jaunes, une ossification du ligament vertébral antérieur, facteur pronostic positif.
Rarement, il est nécessaire de pratiquer une sacco-radiculographie dynamique.
L'IRM peut être un complément intéressant mais l'IRM idéal, dans ce cadre pathologique, serait une IRM dynamique en position debout !
Les examens électrophysiologiques ont une place importante lorsqu'il s'agit de modifier la stratégie thérapeutique ou tout simplement d'évaluer, de façon plus précise, une majoration de la symptomatologie fonctionnelle et éventuellement d'éliminer une pathologie associée (en particulier, neuropathie métabolique).
L'électromyogramme permet d'objectiver une compression proximale (onde F) et les potentiels évoqués somesthésiques (PES) détectent les premiers signes d'atteinte sensitive.
L'électromyogramme précise le niveau exact de la compression, l'atteinte mono ou pluri-radiculaires et mesure le degré d'atteinte neurologique.

Evolutivité

Il est reconnu qu'une hauteur discale conservée favorise le glissement antérieur et la symptomatologie à l'effort. Par opposition, la discarthrose et l'hypertrophie antérieure des massifs articulaires postérieurs freinent l'olisthésis.
La classification radiologique (angle transverse facettaire et type morphologique vertébral avec mesure de la distance inter-facettaire) permet de "prévoir" les spondylolisthésis à haut risque d'évolution. Chez ces sujets, on retrouve un angle transverse facettaire faible et une petite distance inter-facettaire.
Sur le plan clinique, la symptomatologie de ces sujets sera la plus riche, pouvant aller jusqu'au déficit moteur.

Traitement

Il reste essentiellement médical en l'absence de déficit neurologique. La simple radiculalgie ne constitue pas une indication de prise en charge chirurgicale. Il a été démontré que le traitement conservateur associant les anti-inflammatoires, antalgiques, infiltrations de gluco-corticoïdes par voie foraminale (en cas d'atteinte mono-radiculaire) ou par voie caudale par le hiatus sacro-coccygien ainsi que la rééducation en cyphose avec une tonification active et passive de la sangle abdominale, permet la prise en charge de 80% des patients.
Dans le cas d'un déficit neurologique, sans attendre le syndrome de la queue de cheval ou des troubles sphinctériens, la décompression par voie postérieure s'impose. Elle sera associée à une arthrodèse s'il existe un risque important de glissement antérieur, les remaniements dégénératifs n'étant pas suffisamment avancés pour constituer une stabilisation naturelle.

Dr Jacques LLOPIS
Rhumatologue - Vence

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